
Le cœur de Chair bat au rythme des machines qui l’exploitent.
À l’instar du futur récit de science-fiction, il m’est impossible de vous communiquer le titre de ce projet. Long de 140 000 mots (très gros bébé !) il est un roman massif explorant le monde de Chair, situé dans un univers organique (littéralement !). Largement inspiré par le travail de Beksinski.
Le livre est écrit, son histoire est complète. C’est un livre avec lequel j’ai une histoire particulièrement éprouvante, parce que sa gestation le fut. Il a fait l’objet d’une fascination morbide. J’y ai projeté tout ce que m’a inspiré l’art de Beksinski, et cela m’a épuisé émotionnellement. L’élaboration de cet univers organique et notamment de sa mythologie autour de l’Enfant Sacrifié, m’a vidé. C’est à cette fatigue que je dois la réalisation éclair du roman Les Insomniaques. Lorsque je l’ai achevé, il m’a laissé à la fois une impression de profonde satisfaction et une frustration. Elle a fini par inspirer un autre récit et a influencé ma direction artistique pour d’autres histoires encore après elle. J’ai continué d’étudier le travail de Beksinski, prévoyant même d’aller à son musée à Cracovie. Si l’univers organique est devenu ma marque de fabrique, et je le dois à ce livre. Mais je le dois surtout à Giger et Beksinski, qui sont les vrais génies.
Il y a encore beaucoup de travail autour de ce projet, j’ai bon espoir de vous le proposer au début de l’année 2027.
En attendant, parce qu’il faut bien rendre concret cet univers organique, je vous en propose un extrait ainsi qu’une oeuvre de Beksinski pour accompagner l’atmosphère de l’écrit :

Extrait exclusif du projet :
Mais lorsque ses yeux se sont rouverts, là où son assaillant attendait de la résignation, il ne vit qu’une détermination mortelle. Le chevalier leva sa lame, et la glissa dans l’ouverture de l’armure de son adversaire, enfonçant toute la longueur de son fer en passant par la clavicule découverte.
Il arracha d’un coup sec la lame, et le sang suivit la rapière en inondant le visage de sa victime. Cette dernière essaya d’arrêter l’hémorragie, mais déjà, son corps défaillait. Après deux pas maladroits, le combattant de la République s’effondra.
Demeure alors debout, malgré son équilibre chancelant, le chevalier en manteau bleu. Ce dernier, le côté saignant abondamment, fit sortir la lame qui lui avait ouvert le flanc. Il mit un genou à terre en grimaçant de douleur.C’est à ce moment que je me suis senti à nouveau capable de bouger, et de courir vers le chevalier blessé. Lorsque je suis arrivé à son niveau, il leva les yeux vers moi.
Je pense qu’il ne comprit d’abord pas, trop étourdi par l’hémorragie pour comprendre qui j’étais. Il cligna des yeux, ses paupières tremblaient, comme s’il commençait déjà à perdre connaissance.
Il finit par me fixer, et dit :
« Ça va pas le faire, je crois. »
Aujourd’hui, je suis en mesure de comprendre son sourire, mais à cette époque, il m’a profondément marqué, et poursuivi. Il souriait à pleines dents, en constatant d’un air fier qu’il avait terrassé seul trois hommes. Puis, il est revenu vers moi, et son visage s’est soudain assombri.
Sa bouche s’est ouverte sur une expression désolée. Il s’est excusé, ce que j’ai mis longtemps à comprendre :
« C’est toi, hein… Il a baissé les yeux, honteux. Mais il n’a jamais rien dit de plus à ce propos, ça m’avait déjà tellement réchauffé le cœur, qu’il n’était pas nécessaire qu’il dise autre chose. »Il a essayé de se redresser, en s’aidant de sa rapière comme d’appui après l’avoir planté dans la chair au sol. Mais il a défailli quelques centimètres plus haut. Je suis alors venu à son secours, de mes mains tremblantes, mais volontaires. Il m’a regardé le saisir par le bras, et tenter de le soulever, et il n’a rien dit d’abord, il a juste souri, amusé, avant d’enfin déclarer d’un ton navré :
« Non, ça va vraiment pas le faire… »
Il a regardé droit devant lui, clignant des yeux en restant éveillé, alors que je voyais sa peau pâlir sous sa barbe mal rasée, et son corps commencer à trembler. Le sang coulait abondamment de ses plaies, et je ne savais que faire. Il a soupiré un grand coup, si fort et longtemps que je pensais que ça ne s’arrêterait pas. Après une inspiration, il s’est tourné vers moi, et a dit :
« L’Enfant donne l’âme, puis elle lui revient. Mais avant de lui revenir, elle doit en inspirer un autre. »
Il souriait. Et il m’a regardé droit dans les yeux. Si fort que ça m’a à ce moment gêné, j’ai détourné le regard, je ne savais pas ce que ça faisait d’exister à ce point. Cette considération, a effacé la douleur, la peur, et la haine qui grandissaient en moi.
Il m’a attrapé l’épaule, et m’a dit :
« Tu seras ma vengeance, mon garçon, il a hoché la tête d’un air déterminé, ils nous ont pris le Roi, mais nous récupérerons le Dauphin, cette République tombera aussi vite qu’elle est venue. »Il a alors tiré un livre de la poche de son manteau, et me l’a tendu. Sa main tremblait, mais pas autant que la mienne quand je l’ai saisi. Lorsque j’ai eu l’ouvrage entre les doigts, il a ajouté :
« Tout est dedans, tout ce dont tu as besoin pour devenir un protecteur de la couronne. »
Je ne comprenais pas. Je savais juste que comme lui, c’était important.
Et quand il m’a tendu sa rapière, et un stylet qu’il tira de sa ceinture, je savais que je l’étais devenu aussi.
J’étais submergé de tout un tas de sentiments que je ne connaissais pas. Il m’a tout donné, la rapière, le stylet, le livre, il a même tiré son chapeau pour le mettre sur ma tête.
Et il a attendu, en me regardant, d’un air désolé, et d’un œil de plus en plus faible, avant de me dire :« Aucune vie n’est facile sur Chair, mais celle que je te promets, est la plus rude, a-t-il déclaré, d’un ton solennel et d’une voix dont je me rappellerai éternellement, mais tu rencontreras l’Enfant, mon garçon, et sa grâce, illuminera ton chemin comme moi avant toi. Tu feras des erreurs, il acquiesçait à ses propres paroles, comme si elles lui étaient adressées, et tu auras des démons, mais à la fin, à la fin, c’est sa lumière, qui te guidera. »
Il tira alors son manteau, une manche après l’autre, et me le tendit, comme le reste de ses effets, qui finissèrent par reposer sur mes avants bras chargés. Dévêtus de tous ses effets honorifiques, réduits à des vêtements couverts de sang, l’homme pris mon épaule dans sa dernière main encore forte, et me serra avant de dire ces mots :
« Je m’appelle Greer, mon garçon, et toi ? »Je ne m’attendais même pas à ce qu’il pose la question. Mon prénom n’avait jamais eu d’importance, jusque-là. J’étais ému, mais incapable de le montrer, j’ai alors dit :
« édouard. »
Sans cérémonie, sans même manifester de reconnaissance. Et alors, Greer déclara :
« Tu es le dernier d’entre nous, édouard. Il regarde devant lui, vers le village que nous venions tous deux de quitter, et conclue : Maintenant, il te faudra du temps, mais un jour, tu reviendras pour combattre. Tu trouveras un moyen. Pars. »
Et il m’a poussé. Il avait brisé son étreinte comme elle était venue. Il s’est alors redressé, et a avancé, en psalmodiant des mots que je ne pouvais comprendre, mais qu’aujourd’hui, j’employais moi-même.
Je l’ai regardé avancer, jusqu’à ce qu’il s’effondre, et meurt entre là où je me tenais, et le mur visible de l’orphelinat.Je n’avais pas encore les mots pour le dire, ou même le comprendre, mais j’ai senti la chair me dire de partir.
J’ai laissé Greer mourir là, mais j’ai pris avec moi ce qu’il m’avait transmis.Plus que ses effets.
Une reconnaissance.
Une mission.Une âme.
Il m’avait sauvé du vide qui m’avait été promis.
J’ai alors compris que les chants, étaient ceux de l’appel, ceux de l’Enfant qui m’avait convoqué.
Et je les ai suivis, dans les étendues pourpres.
C’est ce dont je me rappelle de ce jour.
Et quoi qu’il arrive…
… Quoi qu’il se passe…
… Cela restera vrai.
La suite de ce Thriller Fantastique dans un univers organique ? Lorsqu’il sera prêt.


En attendant, plongez dans l’art de Beksinski, et rejoignez les Missives Interstitielles pour lire Les Ailes de Narra !