Auteur/autrice : nicolasrobert.auteur

  • La beauté crue et paranoïaque d’Hans Ruedi Giger

    Illustration de la biomécanique, des angoisses paranoïaques de Giger

    Définition polysémique de la paranoïa :

    Avant d’attaquer l’article, on va prendre quelques secondes pour définir Paranoïa, et ce que moi, j’en entends. On va déjà distinguer le fonctionnement paranoïaque : fonctionnement caractérisé par la présence d’idées délirantes systématisées et permanentes, surtout à thème de persécution. et le comportement paranoïaque qui repose sur le même mécanisme mais peut être non systématisé. Nous avons tous des comportements et des réflexes paranoïaques quand nous nous sentons attaqués. Mais le fonctionnement paranoïaque est un biais de perception permanent qui systématise le sentiment de persécution.

    La paranoïa que je vais évoquer dans cet article, est de l’ordre de l’imaginaire. De la construction des représentations et d’un mode créatif. C’est un procédé où l’on associe des menaces à des idées et des concepts, et où les créations découlent de ce mode d’association paranoïaque. Il n’y a rien de pathologique dans l’art de toutes personnes citées dans ce texte.

    On peut passer à la suite !

    Bref historique

    Le Xénomorphe est aujourd’hui plus célèbre que son créateur, Hans Ruedi Giger. Un paradoxe familier, au même titre que la créature de Frankenstein a éclipsé la mémoire de son docteur. Pourtant, sans l’esprit visionnaire de Giger, cette entité cauchemardesque, à la fois organique et mécanique, n’aurait jamais vu le jour. Giger s’inscrit dans une puissante lignée des maîtres du malaise cosmique, ceux qui aiment rappeler à l’homme son insignifiance. Cette vague, où l’inquiétante étrangeté domine, prend sa source moderne avec le Frankenstein de Mary Shelley en 1818. Elle trouve son écho le plus terrifiant dans la paranoïa cosmique d’un Howard Phillips Lovecraft, dont l’œuvre géniale, née au début du XXe siècle, a posé les fondations littéraires de l’horreur gigerienne.

    Cette fascination pour la monstruosité émerge au XIXe siècle. Peut-être portée par l’accélération de la sécularisation qui replace la peur dans le domaine terrestre. C’est selon moi au XXe siècle qu’elle trouve son incarnation ultime. L’atmosphère paranoïaque de l’après-Seconde Guerre mondiale et de la Guerre froide, hantée par la menace nucléaire et l’angoisse de l’Autre, fournit le terreau parfait. Mais Giger opère une synthèse unique : il ne se contente pas d’illustrer Lovecraft. Il invente un langage visuel, la Biomécanique, qui fusionne le vivant et la machine, la chair et l’acier. Son monstre n’est pas une bête venue des étoiles ; c’est un cauchemar issu des entrailles de notre propre civilisation industrielle et technologique, une prothèse devenue parasite. Le Xénomorphe est l’incarnation de nos peurs les plus profondes : la violation du corps, l’instrumentalisation de la vie, et l’horreur d’une sexualité dévoyée et mortifère.

    Giger, Beksinski, Lovecraft, point commun ? paranoïa !

    Le concept de la paranoïa est bien souvent envisagé comme un trouble de la personnalité. Le mot est directement associé aux délires de persécution et à raison d’ailleurs, le paranoïaque est auto-centré et a tendance à envisager l’Autre comme une menace. Ce qui m’intéresse, ce sont les mécanismes sous-tendus par le trouble, et notamment la projection.

    Bien sûr, aucun des artistes cités n’a été diagnostiqué d’un quelconque trouble paranoïaque, nous ne parlons que de l’imaginaire.

    Faisons d’abord un détour par Dali qui a eu le génie d’une méthode qu’il a baptisée méthode Paranoïaque critique qui constitue son approche créative. Elle consiste à laisser libre court aux associations étranges de nos esprits, et les critiquer par la suite. ça a donné naissance à son univers surréaliste. Lovecraft, lui, a une relation avec la paranoïa qui transparaît dans son oeuvre toute entière. C’est un auteur du secret, de l’occulte, du complot caché et des abysses. Ce qui l’intéresse, c’est l’immergé, et par l’immergé, on peut aussi y entendre l’inconscient. Lovecraft est l’homme du mythe oublié, primitif, de l’origine de du monde et d’une fondation cachée.

    Beksinski lui, a toutes les raisons du monde d’avoir développé un imaginaire paranoïaque. Né dans la ville de Sanok en 1929, il a connu la raffle des Juifs dans sa cité à ses dix ans, lors de l’invasion de la Pologne. Pour donner un ordre d’idée, 30% de la population de la ville était Juive. Son art est hanté par des hommes à casque similaires à ceux de la Wehrmacht, de villes en ruines, avec une église qui souvent se tient au milieu des ruines. Les paysages sont souvent d’os, de chair et baigne dans une atmosphère spectrale. Parfois, il survit dans sa peinture les influences surréalistes qu’il pouvait avoir lorsqu’il a été photographe dans ses jeunes années.

    La spécificité de Giger

    Giger, lui, est un homme tourmenté dans son sommeil. Ses cauchemars motivent un mécanisme de sublimation par l’art. Son art est motivé par le besoin d’extérioriser le mal en lui. Tous ont cette capacité de projection de leur angoisse sur un monde intérieur qu’ils concrétisent par leurs oeuvres. Cela n’a cependant rien de particulièrement neuf ou inédit, tout artiste passe son temps à extérioriser l’affect et le sublimer.

    Là où se creuse la différence selon moi, c’est la relation à l’Autre dans le sens Lacanien : tout ce qui n’est pas soi. ça fait du monde, mais c’est consubstanciel du travail de Giger. Il parle uniquement de l’étranger pur, de l’Alien. Ce n’est pas juste une référence au Xénomorphe, c’est une référence à sa vision artistique. C’est un homme qui parle de l’incompréhensible, de l’aliénation. En ce sens, l’artiste qui s’en rapproche le plus est Lovecraft qui travaille sur l’indifférence cosmique.

    Dans l’univers de Giger, l’alien n’est pas indifférent à l’homme, mais le considère comme une ressource.

    L’homme, une matière comme une autre

    Giger dépossède l’homme de son sacré. Pas seulement d’un point de vue spirituel : ni le corps, ni les émotions, ni les sentiments ne le sont. L’homme est une chair comme une autre, ses os sont un matériau, ses cartilages aussi. En arrachant littéralement aux humains ce qui est censé fonder leur valeur à leurs propres yeux, Giger construit une mythologie de l’Autre parfaitement décentrée de l’homme.

    Cette idée n’est pas révolutionnaire en soi ; on peut en retracer la généalogie depuis Galilée et la révolution copernicienne. Si l’homme n’est plus au centre de l’univers, il n’est qu’un aspect du règne de la création. Et la manière dont il manque d’empathie envers le reste du vivant justifie que l’alien puisse, en retour, en manifester une absence totale à son égard.

    À l’instar de l’homme qui se vêt de cuir, la biomécanique gigerienne considère les organes pour leurs propriétés mécaniques. Elle pousse à son paroxysme une logique d’exploitation du vivant déjà à l’œuvre dans notre propre civilisation. Elle nous renvoie l’image glaçante d’un monde où la vie n’est plus qu’une matière première.

    C’est d’ailleurs là où Giger et son art paranoïaque n’est pas tout à fait Alien : il est une expression absolutiste de ce qui nous est très familier. L’exploitation du vivant. L’exploitation du vivant a fait civilisation, et permet le progrès technique et notre confort. Giger pousse les curseurs plus loins. Il inclus dans le progrès technique des matières premières que la morale nous empêche de considérer.

    Quelles incidences sur mon travail ?

    Il m’a aidé à comprendre que la civilisation ne tient qu’à la rigueur morale et sa transmission. Ce qui me fascine avec Giger, c’est le soin apporté à représenter l’horreur dans ce qu’elle a de plus cru. C’est très clinique parce que chez lui, l’organe devient machine sans qu’on ait eu besoin du moindre métal pour y parvenir. Ce n’est pas un hasard qu’il soit un artiste de l’ère post-industriel, où on se demandait bien jusqu’où le progrès irait. Probablement marqué aussi par l’industrie de la mort des camps d’extermination, où on récupéré les cheveux et les dents en or après avoir suffisamment déshumanisé les victimes.

    Avoir conscience que la civilisation tient à cette rigueur, ça m’a fait reconsidérer des choses aussi bête que respecter les marques de politesse de base : bonjour, s’il vous plaît, pardon, merci, au revoir. Parce qu’à partir du moment où on rogne sur ces petites choses, on ne sait pas ce qu’on va accepter de compromettre. Si la civilisation est une ascension, la décivilisation est une descente et elle se fait par pallier, et c’est parce qu’on a encore la perspective de voir ce qui nous sépare des deux que ça a l’air immense.

    ça ne l’est pas, il a suffit d’un virus et de toutes les psychoses sociales qu’il a engendré pour que l’on voit le tissu social à deux doigts de rompre durant la pandémie. ça m’a aussi appris à ne pas trop juger les mythes et croyances des temps anciens, où on était bien plus aux prises avec la maladie, la guerre et la mort, il fallait bien que quelque chose, et ce quelque chose était souvent religieux. Il faut toujours qu’une transcendance fédère et donne un sens.

    Une fonction déculpabilisante

    Giger, ça m’a appris à ne plus avoir peur des idées bizarres que j’avais en tête. Notamment du rapport au corps, à la chair, et à l’esthétique. Comprendre ce qu’il faisait, m’a aidé à légitimer les images que j’avais en tête. Cela m’a libéré de certains complexes créatifs. Je ne cherche pas à rendre compte de quelque chose que j’ai vécu, à l’instar d’un Beksinski qui n’expliquait pas son art. Je ne m’explique pas toujours ce qui me vient. Mais si ça vient, je le respecte et le réalise. C’est d’abord bizarre, mais comme Dali l’a compris, le sens vient après. Nos créations savent ce qu’elles sont avant que nous les comprenions.

    Du moins, c’est ma conviction et j’imagine que c’est ça qui caractérise la méthode paranoïaque : on sait avant de savoir. On pourrait remonter jusque Rimbaud qui avait cette phrase je est un autre. On pourrait aussi poursuivre le développement sur la pensée de la construction identitaire en psychanalyse, mais je pense que le message est assez clair :

    Je lui dois partiellement ce besoin de me sentir pleinement libre d’accepter ce qui vient, pour créer. Mais est-ce que ça fait de moi un surréaliste ?

    Probablement, mais comme vous pouvez le voir, il y a une filiation directe, comme quoi, tout se recoupe !

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  • Le romantisme de Lorenzaccio, hommage à Alfred de Musset

    Le romantisme me semble stigmatisé aujourd’hui. C’est un courant qui me paraît moqué parce qu’il serait, d’une certaine façon naïf et trop sensible.
    Ce qui – de fait – est tout à fait compréhensible quand on considère ce qui définit le mouvement.

    Voici la définition proposée par le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales :

    Mouvement, art littéraire qui a donné une large place aux descriptions poétiques, aux épanchements intimes, aux sujets sentimentaux, religieux, fantastiques, aux décors historiques (notamment médiévaux), exotiques, et qui a pratiqué le mélange des genres, recherché les effets de contraste.

    Toute ressemblance avec le projet des Interstices serait tout à fait fortuite. Du mélange des genres aux effets de contraste en passant par les effets de style, il y a beaucoup dans mon ADN littéraire qui est directement issu du romantisme. Si j’ai peu de références littéraires qui m’ont influencé, il y en a au moins une qui est capitale.

    Lorenzaccio, d’Alfred de Musset. Un spectacle dans son fauteuil, pièce de théâtre en prose travestie en roman. Ces choix lui ont permis d’advenir dans une époque où l’unité de lieu et de temps imposées aux pièces un carcan. Lorsque le roman est réalisé, sur une idée de George Sand (qui s’appelle en réalité Aurore Dupin, le nom de George Sand sera créé pour lui permettre de publier) en 1834 il n’est pas destiné à la scène. Il le deviendra au fil du temps. Jusqu’à devenir un véritable exercice d’adaptation pour de nombreux metteurs en scène.

    Mais c’est aussi et surtout l’exemple même du drame romantique. Et lorsque je le découvre, dans mon année de Terminale (l’ouvrage était au programme en filière Littéraire) en 2014, je tombe rapidement sous le charme de son ton et de ses thèmes.

    Les thèmes romantiques, les faux-semblants, la perversion de l’âme et les masques

    Drame politique et social, Lorenzaccio, conte l’histoire du régicide à venir du Duc corrompu de Florence – Alexandre de Médicis – par son cousin : Lorenzo.
    Lorenzaccio est la contraction de Lorenzo et -accio qui est le suffixe qui signifie « petit ». Lorenzaccio motive le meurtre de son cousin par volonté de purifier Florence et de la libérer de la dépravation de son dirigeant. Toute la tension dramatique du récit, repose sur la manière dont Lorenzaccio parvient à accomplir son destin. Par un long processus de corrumption pour se rapprocher de son cousin. Ainsi, il achète sa confiance, pour finalement l’abattre après avoir sacrifié jusqu’au moindre atome de sa vertu.

    Songes-tu que ce meurtre, cest tout ce qui me reste de ma vertu ?

    Il y a d’ailleurs, au moins deux personnages dans mes romans, qui portent des masques pour camoufler quelque chose. Une tradition culturelle que l’on retrouve jusque dans la saga de George Lucas – Star Wars – en la personne de Vador. On reparlera de l’oeuvre de Lucas.

    La perspective historique est primordiale pour contextualiser Lorenzaccio. En 1834, la France a un gouvernement, mais elle est régentée par Louis Philippe Premier, qui se présente non pas comme le Roi de France, mais comme Roi des Français.

    Une oeuvre romantique contre-révolutionnaire ?

    Lorenzaccio est écrit dans ce contexte historique, presque comme un post-mortem de la Révolution Française. Le Roi est de retour, et le roman de Musset intervient comme un récit particulièrement ambigu. Il dépeint un pouvoir politique corrompu, mais un personnage principal qui se corrompt en voulant purifier la ville.

    Lorenzaccio est une oeuvre romantique sur la corruption du pouvoir, mais aussi sur l’échec des idéaux révolutionnaires. Le recul historique nous permet désormais de nuancer plus son positionnement quant à la monarchie et la Révolution, mais l’ambiguïté morale et politique qui constitue la tension du récit, lui donne encore une force symbolique rare.

    Lorenzaccio n’est pas une oeuvre contre-révolutionnaire selon moi, c’est par contre un ouvrage qui questionne ce qu’est la vertu. J’y vois avant tout une réflexion sur les intentions, et une illustration d’un très vieil adage dont la pertinence ne fait que bégayer au long de l’histoire :

    L’enfer est pavé de bonnes intentions

    Bernard de Clairvaux, XII ème siècle

    Lorenzo, le héros tragique par excellence du romantisme

    Le motif du masque – capital dans l’oeuvre de Musset – est à la fois un emprunt à la tradition scénique de l’Antiquité où les comédiens apparaissaient masqués, mais aussi la symbolique de Lorenzaccio lui-même. Il avance en secret, son agenda est caché, comme ses intentions et son moi profond. Ce qui relève de la tragédie romantique dans le développement du personnage, c’est que Lorenzaccio ne cache pas Lorenzo : il le consume.

    Lorenzo, devient littéralement la corruption du duc, pour pouvoir s’en défaire. Et sans offrir d’alternative au pouvoir, il ne provoque que le remplacement d’un corrompu par un autre. Qui, évidemment, durcira le ton en matière de sécurité dans Florence. Avec un dirigeant assassiné comme martyr, quoi de mieux pour justifier une dérive autoritaire ? D’aucun y verront une critique frontale de la période de la terreur.

    Lorenzo, par orgueil, porté par un récit intérieur qui le légitimise du meurtre de son cousin, justifie sa propre déchéance. Il s’en nourrit pour mener à bien son projet, achevant de détruire le peu de vertu de qui lui restait.

    Lorenzaccio est une mise en garde des deux fronts : La tentation autoritaire de toute forme de pouvoir qui serait concentré en trop peu de mains, et la volonté révolutionnaire qui peut motiver le renversement du pouvoir pour une finalité chaotique. Qui donnera naissance à une longue période de perturbations politiques constellée d’atermoiements où s’enchaînent empires et républiques.

    La relation entre le romantisme de Lorenzaccio et Les Interstices

    Elle est d’abord stylistique. J’ai un style romantique, souvent poétique, parfois ampoulé. Excessif dans l’expression des émotions de personnages très introspectifs, très graves, très affectés. C’est un héritage assumé, tout comme la théâtralité des échanges. Mais une nuance cependant : né à l’époque du cinéma, mon style est davantage cinématographique qu’il n’est scénique. La nuance est fine, mais la caméra existe souvent dans la composition de mes scènes.

    Il y a aussi une volonté de s’affranchir de « codes » narratifs avec Les Interstices. nous vivons dans une époque de liberté, personne ne viendra plus scruter le respect de règle en littérature. C’est davantage une volonté de surprendre et de jouer avec les limites de ce qu’on « envisage ». Parce que s’ils existent des limites institutionnalisées, il existe tout autant des limites de l’ordre du conventionnel. Lorsque les médias murissent, ils se codifient, et tout le monde acquiesce plus ou moins aux codes des genres. Si je ne prétends pas révolutionner quoi que ce soit, il y a dans mon travail, au moins une volonté de jouer, de tester les atomes crochus entre différents genres. Le but est de chercher de nouveaux espaces d’expressions, des nouveaux liens dans les oeuvres.

    Des Interstices, ces liants non pas invisibles, mais invisibilisés dans la masse des genres.

    à l’instar d’un Lorenzaccio qui s’est autorisé certaines libertés pour mélanger le théâtre et le roman, je compte m’autoriser tout ce qui me paraîtra pertinent dans mon voyage littéraire pour trouver les atomes crochus qui lieront entre eux des contraires présumés.

    Et si je ne dois pas tout ça à Musset, je lui dois au moins le style d’expression. J’embrasse le romantisme dans ses excès et son esthétisation, qui permet la composition de tableaux que je trouve marquant.

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  • Sortir du bois : 4 ans, 600 000 mots, des remerciements – avant Les Insomniaques

    Écrire un roman, c’est comme gravir un sommet dont on ignore la route. Voici le récit de mes quatre années d’ascension solitaire, entre doutes, folie raisonnée et hommages aux maîtres invisibles qui m’ont guidé. Avant la sortie de Les Insomniaques, je sors du bois pour vous raconter comment on atteint un objectif autrefois impensable – un mot à la fois. Et pour cet acte de foi, déjà, merci à moi.

    Imaginez : vous travaillez dans l’ombre depuis quatre ans. Quatre ans que vous avancez à tâton vers un objectif qui s’éclaircit à mesure que vous avancez. On s’imagine que les créatifs ont une vision claire dès le moment où ils commencent à tendre vers elle. Je peux vous dire que pour moi, ça n’a pas été le cas. Globalement, je savais ce vers quoi j’allais, mais pas comment y arriver. Je pense que l’image la plus proche de ce que je fais depuis quatre ans, c’est me dire « ce sommet là, je vais l’atteindre ». Sauf que je ne connaissais pas la route qui y menait, j’avais juste très envie d’y être.

    Brel l’a dit à l’époque « le talent ça n’existe pas » le talent, c’est l’envie. Et j’avais très envie d’atteindre un certain point. Et pour la clairvoyance de cet artiste pour qui j’ai le plus grand respect et la plus grande admiration pour la plume et l’interprétation, merci. Heureusement pour moi, j’ai beaucoup arpenté de collines avant de m’attaquer au sommet que j’ai visé ces quatre dernières années, ça m’a permis d’être plus à l’aise dans l’exercice.

    Le temps presse – celui des remerciements est venu

    Et dans quelques semaines, je vais offrir au monde le premier chapitre de mon voyage vers ce sommet. C’est un moment capital pour moi, parce que si dans mon entourage, ils sont nombreux à savoir que j’écris depuis des années, ils n’ont pas conscience de ce que ça représente.

    Parce qu’on parle quand même de : 600 000 mots. Ayn Rand cette tarée n’a fait qu’un livre – la Grève – avec ce volume de mots écrits. Je vous ai fait la fleur d’en faire sept avec ce même volume parce qu’il ne faut pas déconner. Je pourrais m’amuser à faire un top des romans les plus longs, certains dépassant le million de mots, mais ça serait s’enfoncer dans les névroses obsessionnelles les plus inquiétantes du genre humain.

    On va dire que ça me rend presque raisonnable avec mon volume de 300 000 écrit sur cette dernière année. Ouf, j’aurais presque pu passer pour déraisonnable à cumuler travail et écriture à ce niveau d’intensité.

    Où est-ce qu’on va ?

    Ces élucubrations, quel sens ont-elles ? Me préparer à sortir du bois, à me révéler progressivement jusqu’à la sortie de mon premier roman – court – Les Insomniaques. Jusque là, je me prêterai à l’exercice des hommages, avec un rythme hebdomadaire, dans une série qui s’appellera… merci.

    Parce que l’écriture est une aventure solitaire que l’on révèle au collectif, mais c’est surtout un exercice de solitude partagée avec des maîtres. Avant de me dire merci à moi pour ma persévérance et le courage de me révéler, j’ai des dizaines de personnes à remercier. Se seront rarement des gens que j’aurais fréquenté, mais toujours des esprits qui m’ont transmis, dont mon imaginaire s’est infusé et nourri de celui qu’ils nous ont partagé.

    Musset.
    Giger.
    Beksinski.
    Jean Giraud.
    Mishima.
    Miyasaki.
    Okabe.
    Avellone.
    Taro.
    Sawyer.
    Colantonio.
    Villeneuve.
    Lucas.
    Nicholls.
    Mortreux.

    Ils y auront tous droits.

    Ils auront tous droits à un merci, avant que je ne sorte du bois.

  • Bienvenue dans Les Interstices !

    Le motif de la faille, de la cicatrice, de l' "ouvert" revient systématiquement dans les écrits des Interstices.

    Vous vous êtes donc glissé dans les Interstices ? Félicitations !


    Un premier tour des lieux s’impose. Ici, l’imagination comble les blancs et le sable a la mémoire longue. Vous y trouverez les premières pierres d’un univers en gestation :

    La présentation de « Les Insomniaques », premier récit de cet univers, à travers deux extraits qui en dévoilent l’atmosphère.

    « Les Ailes de Narra », une nouvelle initiatique qui vous est offerte dès votre inscription aux Missives Intersticielles.

    Et en libre accès, le texte « Sédiments d’un jour », un premier regard que je vous laisse découvrir.

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    Oh… Un fragment dissimulé attend dans un interstice plus secret. Saurez-vous le trouver ?

    Ce premier article est aussi l’occasion de dire qu’il y aura de nombreuses communications à propos de l’avenir. Si aujourd’hui je ne suis prêt qu’à évoquer le cas des Insomniaques sachez que rapidement, je commencerai à parler d’autres choses. Il y aura de nombreux après, et la prochaine grande étape après la publication de ce premier court roman, sera une bien plus longue aventure qui ouvrira des perspectives gigantesques.

    Aussi, étant un peu joueur, voire coquin, j’ai eu la gentillesse de vous prévenir qu’il y avait un petit secret dans cet article. Sachez que je ne serai pas aussi généreux en indice à l’avenir, et qu’il y aura pourtant toujours au moins un petit quelque chose de caché que vous apprécierez découvrir.

    Je suis heureux que vous ayez trouvé le chemin des Interstices. Je peux vous certifier que vous ne serez pas déçu du voyage. Pour ne manquer aucune découverte, abonnez-vous aux Missives Interstitielles.